Parfois, quand le vent souffle
tellement fort qu’il en arrache le sommet des montagnes, parfois on
l’entend encore, l’homme qui chuchote, à moins que ce ne soit les géants
qui s’interpellent dans leur sommeil.
Personne ne sait qui il était vraiment. Ses soupirs étaient des souvenirs hurlant qu’on ne l’abandonne pas. Il avait tellement crié que sa voix continuait à se répercuter sur le moindre atome.
« Monseigneur, ne serait-ce pas plutôt une fausse bénédiction, un malentendu terrible ? Cet homme au final, n’est jamais mort.
- Madame, il n’est peut-être jamais mort, mais son cri l’a tué. »
À sa mort, l’homme qui chuchote commença à survoler le monde, sans jamais retoucher terre, courant dans les airs dans l’espoir d’échapper à ses furies. Cependant, son cri se perdit avec le temps, ses mots désarticulés rendant ses paroles muettes, et il ne devint plus qu’un chuchotement. Son cadavre lui-même avait disparu, rongé par les eaux, les vers et la déesse mère. Il n’était plus que l’époux des gargouilles qui daignaient parfois l’accueillir dans leurs gueules immenses où ses pleurs rejoignaient les leurs.
Un jour pourtant, son cri se mua en autre chose. Plus personne ne l’entendait déjà, il le savait. Il devenait l’homme du silence. Alors, il commença à chanter. Oui il chantait ! Sa voix reprenait le doux pétillement de la sève, du brin d’herbe à peine né qui se frayait un chemin vers la lumière. Il appelait l’oubli du ton le plus joyeux qui soit. Malheureusement, un tel changement fit ressurgir un écho de conscience, un frêle baiser de l’âme, et le chant se mit à imiter le doux clapotis de la mer après un jour de tempête, le vent dans les arbres calcinés par les incendies. Il pleurait et il ne savait plus pourquoi.
« Monseigneur, mais qu’on le sauve ! Mes oreilles ne sauraient tolérer une seconde de plus une telle tristesse. »
Toujours en chantant, il s’approcha d’une jeune fille qui se promenait dans les bois en riant. Le vent n’était réduit qu’à une simple brise. Pourquoi elle ? Peut-être était-ce un hasard. Peut-être qu’elle lui ressemblait, le nez, la bouche… Oui c’était les siennes, elle était si jolie... Il lui murmura à l’oreille : « Joli cœur, écoutez-moi. Je suis le simple fantôme d’une colère passée, les regrets d’un homme esseulé. Je ne suis plus qu’une pauvre âme… S’il vous plait, ne m’oubliez pas. » La jeune fille s’arrêta, étonnée. Elle demanda à son amie qui l’accompagnait si elle avait entendu cette voix, cette magnifique voix. Mais elle lui répondit que non.
L’homme qui chuchote s’éloigna, laissant la jeune fille un peu perdue, ayant senti naître dans son cœur une douleur inconnue, un gouffre qu’elle ne pourra jamais combler. Le vent tourna, apportant de nouvelles senteurs, froides, hivernales. Le chuchotement s’étiola, jusqu’à ne laisser que des bribes bientôt dissoutes par la pluie. Et c’est ainsi que le cri devint femme.
Personne ne sait qui il était vraiment. Ses soupirs étaient des souvenirs hurlant qu’on ne l’abandonne pas. Il avait tellement crié que sa voix continuait à se répercuter sur le moindre atome.
« Monseigneur, ne serait-ce pas plutôt une fausse bénédiction, un malentendu terrible ? Cet homme au final, n’est jamais mort.
- Madame, il n’est peut-être jamais mort, mais son cri l’a tué. »
À sa mort, l’homme qui chuchote commença à survoler le monde, sans jamais retoucher terre, courant dans les airs dans l’espoir d’échapper à ses furies. Cependant, son cri se perdit avec le temps, ses mots désarticulés rendant ses paroles muettes, et il ne devint plus qu’un chuchotement. Son cadavre lui-même avait disparu, rongé par les eaux, les vers et la déesse mère. Il n’était plus que l’époux des gargouilles qui daignaient parfois l’accueillir dans leurs gueules immenses où ses pleurs rejoignaient les leurs.
Un jour pourtant, son cri se mua en autre chose. Plus personne ne l’entendait déjà, il le savait. Il devenait l’homme du silence. Alors, il commença à chanter. Oui il chantait ! Sa voix reprenait le doux pétillement de la sève, du brin d’herbe à peine né qui se frayait un chemin vers la lumière. Il appelait l’oubli du ton le plus joyeux qui soit. Malheureusement, un tel changement fit ressurgir un écho de conscience, un frêle baiser de l’âme, et le chant se mit à imiter le doux clapotis de la mer après un jour de tempête, le vent dans les arbres calcinés par les incendies. Il pleurait et il ne savait plus pourquoi.
« Monseigneur, mais qu’on le sauve ! Mes oreilles ne sauraient tolérer une seconde de plus une telle tristesse. »
Toujours en chantant, il s’approcha d’une jeune fille qui se promenait dans les bois en riant. Le vent n’était réduit qu’à une simple brise. Pourquoi elle ? Peut-être était-ce un hasard. Peut-être qu’elle lui ressemblait, le nez, la bouche… Oui c’était les siennes, elle était si jolie... Il lui murmura à l’oreille : « Joli cœur, écoutez-moi. Je suis le simple fantôme d’une colère passée, les regrets d’un homme esseulé. Je ne suis plus qu’une pauvre âme… S’il vous plait, ne m’oubliez pas. » La jeune fille s’arrêta, étonnée. Elle demanda à son amie qui l’accompagnait si elle avait entendu cette voix, cette magnifique voix. Mais elle lui répondit que non.
L’homme qui chuchote s’éloigna, laissant la jeune fille un peu perdue, ayant senti naître dans son cœur une douleur inconnue, un gouffre qu’elle ne pourra jamais combler. Le vent tourna, apportant de nouvelles senteurs, froides, hivernales. Le chuchotement s’étiola, jusqu’à ne laisser que des bribes bientôt dissoutes par la pluie. Et c’est ainsi que le cri devint femme.